On ne conteste pas un ordre même quand il est stupide...

Charlie leva le nez lorsque la musique stoppa, espérant que cela durerait. Mais elle fit aussitôt une grimace lorsque la musique fut remplacée par des sons stridents à percer les tympans.

- Arrrrrgh ! grognèrent-ils tous.

- Sale pute ! lança un d'eux.

Charlie, quant à elle, se mit à donner frénétiquement des grands coups de pieds dans le siège conducteur, aidée par Billy Boy. Au moins, cela leur faisait oublier à moitié ce qu'ils devaient endurer.

- Mais quelle pauv'conne... grommelait Charlie dans sa barbe. Elle a vraiment qu'ça à foutre !

- Ouais, pas étonnant qu'il y ait autant de délinquance, quant on voit l'exemple que donne la justice !railla Billy en ricanant.

A ces mots, les loubards pâlirent. La prison fédérale, on se dit toujours que ça n'arrive qu'aux autres, et puis un jour... Charlie fronça les sourcils pendant que Billy Boy s'agitait nerveusement sous elle.

- Hé... Hé ! murmurra-t-il dans son oreille. Ma p'tite chouette effraie, tu me laisseras pas tomber, hein ?

Charlie se retourna vivement vers lui - du mieux qu'elle le pouvait - et plaqua une main sur sa bouche.

- La ferme ! susurra-t-elle le plus bas qu'elle pouvait. Tant que t'as mon argent, je te laisserai pas filer !

Charlie s'en fichait bien des autres, mais elle devait bien reconnaître qu'elle ne pouvait pas laisser Billy disparaître comme ça, que ce soit pour l'argent qu'il lui donnait ou le reste.

- Maintenant, on se calme ! dit-elle avec raison - voilà qui était extraordinairement surprenant venant de sa part !

Elle poussa un long soupir et dit à la policière le plus calmement et poliment possible :

- Bon... qu'est-ce que t'attends de nous, alors ?

Charlie hocha impatiemment la tête et souffla :

- Ouaais ouaaais okaaaay si tu veux ! D'accord ! T'es gentille, t'es mignonne, t'es superwoman wooohooo j'aurais jamais su m'en sortir sans toi, merci mille fois ! minauda-t-elle.

Elle reprit plus sérieusement :

- Ok bon... ça c'est fait. Quant à Billy...

Elle jeta un regard aux loubards qui eux-mêmes la fixaient avec espoir, pensant qu'elle allait trouver une combine pour les sortir de là. Mais ils tirèrent des tronches de trois mètres de long lorsque Charlie poursuivit :

- Tu peux garder tous les autres, mais laisse-moi repartir avec celui-là. Après tout, sans ses suivants, il sera plus vraiment une menace, pas vrai ? Se retrouver tout seul face au reste du monde, ça lui servira de leçon... ça marche ?

Charlie ricana intérieurement, pensant que la policière se fourrait le doigt dans l'oeil en pensant qu'elle n'était pas du genre à bastoner. Elle avait simplement de la chance qu'elle soit dans un bon jour et raisonnablement clean, sinon, elle aurait réglé l'affaire à coup de meteor hammer, voiture explosive ou non.

Alors que la millicienne faisait sortir Charlie et Billy, les autres loubards se mirent à protester bruyamment, certains suppliant, d'autres insultant aussi bien la représentante des forces de l'ordre que les deux criminels. Charlie n'en avait cure, tout comme Billy Boy qui, trop content de sauver sa peau, n'avait même pas un regard pour ses anciens suivants, bien qu'il sût quel serait leur sort. Quoi de plus normal, après tout ? Le chef s'en sort, les subordonnés se sacrifient.

- Ouais, ouais ça me va, formidable, super, vvvvvonderful ! minauda hypocritement Charlie, dissimulant à peine son ironie.

Elle frotta ses poignets endoloris par les menottes lorsque ces dernières lui furent retirées. Elle pensa durant une fraction de seconde à sortir une de ses armes et à régler son compte à la millicienne, mais elle était suffisamment - et exceptionnellement - lucide pour se rendre compte que ce serait très stupide et qu'elle se retrouverait à nouveau fourrée à l'arrière de la voiture en compagnie d'une dizaine de criminels revanchards. Mieux valait faire profil bas et mettre les voiles le plus vite possible.

Elle cilla d'un air incrédule lorsque la policière se présenta. Elle retint de dire tout haut ce qu'elle pensait :

*Hein ? Mais qu'est-ce que je m'en fous de qui tu es ! Et comme si j'allais t'épargner à cause de ce que t'as fais ! Tu rêves, gourdasse !*

Encore une fois, elle se dit qu'il serait idiot de dire ceci, ce qui serait compromettant. Elle sourit hypocritement, ce qui ressemblait plus à une grimace qu'autre chose, d'ailleurs.

- Bon... On peut y aller maintenant ?