Visite inattendue [PV]

Cela devait faire à peu près une semaine maintenant que Jayanti n'avait plus eût de nouvelles de Calvin McLean, sa nouvelle expérience. Il était vrai que la jeune psychologue et médium à ses heures, avait eût un planning très chargé ses derniers jours, entre ses séances officielles ou non, au sein de la Diacryon ou en dehors, elle n'avait pas eût le temps de vérifier si son expérience se déroulait comme prévu.
C'est pourquoi, de bon matin, un jour ou elle n'avait pas de consultations, elle décida de lui rendre une petite visite.
Jayanti avait tiré une bonne leçon de sa dernière, et première rencontre avec le jeune homme, et avait donc ajouté un deuxième t-shirt sous l'une de ses habituelles larges tuniques colorées, choisies pour dissimuler ses cicatrices et autres ecchymoses, encore heureux que la jeune femme supportait bien la chaleur. Elle avait aussi rassemblé ses longs cheveux en une queue de cheval afin d'avoir le visage dégagé. Toutes ces attentions n'étaient pas faites exprès pour Calvin, étant donné que la jeune femme mettait un point d'honneur à faire ça tous les matins depuis des années, mais elle était sûre qu'elles joueraient en sa faveur, puisqu'elles la mettait en valeur.

Se disant que si elle ne faisait pas le premier pas, lui le ferait sûrement, Jayanti s'était renseignée pour savoir quel était l'appartement de Calvin et s'était donc décidée à y faire un saut avant que lui n'en fasse un au sien; en effet, l'appartement de Jayanti était assez représentatif de son univers, et même si il ne dévoilait pas tous ses mystères, il en révélait quelques uns, et la jeune femme tenait à éviter de dévoiler quoi que ce soit à son sujet tant qu'elle doutait toujours de ce docteur Grey.
La jeune femme avait profité de ses insomnies pour relire ses nombreux manuels de psychologie traitant des troubles dissociatifs de l'identité, mais ils ne l'avaient pas beaucoup aidée malheureusement. Mais Jayanti était toujours suspicieuse quand à ses intentions.

Elle finit par trouver la porte de l'appartement de Calvin, cela dit, elle appréhendait quelque peu leurs retrouvailles, peut-être qu'elle se trompait du tout au tout, qu'il ne l'aimait pas et qu'il ne désirait pas la revoir et qu'il vaudrait mieux qu'elle laisse tomber. Pourtant, elle ne pouvait s'y résoudre, il lui semblait criminel de laisser passer une occasion comme celle-là, et voilà pourquoi elle se tenait là, debout devant sa porte à ne pas savoir si elle devait frapper ou non. Après tout, il serait bête qu'elle reparte maintenant, elle avait fait le chemin pour ça.
Se forçant à sourire, et s'armant de courage, Jayanti finit par frapper à la porte.

Calvin était dans son appartement à relire le compte-rendu qu’il remettrait à son patron concernant sa dernière assistance à un agent de terrain en difficulté. À ses yeux, les résultats n’étaient pas des plus brilants. Oui, les agents de la Diacryon étaient des militaires de formation pour la plupart mais il n’en demeurait pas moins que ce n’étaient pas des experts dans l’art de la discrétion et de la dissimulation… Ce qui compliquait de façon considérable les plannings les plus audacieux qu’ils étaient en mesure d’établir du côté de la logistique. Et Calvin ne cessait de le noter encore et encore, réclamant à grands cris des séminaires ou des rencontres spécialisés pour former ces gens aussi discrets qu’un éléphant dans un champ de mines. Il n’avait pas que cela à faire, sauver la peau de ces ras cassés à tout bout de champ… Se servant une énième tasse de café, il allait entamer la rédaction d’un nouveau paragraphe quand il entendit qu’on cognait à sa porte. Usant de son propre réseau de sécurité, il ne tarda pas à identifier qui venait le voir : il s’agissait de la ravissante docteure Keo. Surprit, il alla ouvrir, se demandant ce qu’elle venait faire à son domicile. Habillé sobrement mais d’une élégante façon, il se savait à tout le moins présentable malgré la surprise, agréable il va de si, qui se lisait sur son visage. Toute une surprise d’ailleurs.

« Docteur Keo! Que me vaut l’honneur d’une telle visite? J’avais dans l’idée de passer vous voir pour une visite de courtoisie mais mon emploi du temps a connu plusieurs… Contretemps. Fâcheux il va sans dire. Puis-je vous servir quelque chose à boire? À manger peut-être? Entrez, entrez, faites comme chez vous et ne regardez pas le désordre… J’ai manqué hélas, de temps pour le ménage… »

Sauf que le domicile de Calvin était impeccable et d’une propreté à toute épreuve. Seul son bureau, son espace de travail donc, comportait quelques éléments pêle-mêle, à savoir, ses dossiers en cours et encore, il fallait être maniaque de la propreté pour en faire un cas. Mais c’était ça Calvin, un homme de principes. Perfectionniste et tout…

« Permettez-moi de vous remercier à nouveau pour l’aide que vous m’avez fournie. Je dors beaucoup mieux et me porte comme un charme depuis votre intervention. Oh, j’y pense… On a déposé ceci dans ma boîte aux lettres et le destinataire, inconnu, ce qui est curieux, me demandait de vos le remettre en main propre… »

L’inconnu c’était le docteur Grey qui profitant du sommeil de Calvin avait prit le contrôle du corps pour contacter Jayanti. Le contenu de la missive se résumait essentiellement à « À quand notre prochaine discussion entre professionnels? » Lui de son côté n’avait pas chômé pour mener à bien ses propres plans…

Bon point pour la jeune femme, Calvin semblait assez content de la voir, même si il paraissait surpris, ce qui était normal puisqu'il n'était pas dans ses habitudes de rendre visite à ses patients, sauf si bien sur, c'était eux qui l'appelait. Mais Calvin ne devait sans doute pas en savoir assez sur ses agissements pour s'en formaliser, ou peut-être croyait-il qu'il ne s'agissait pas là d'une visite professionnel.

Bien qu'elle aurait dût, Jayanti n'était pas préparée à ce qu'il lui demande ce qu'elle faisait là, aussi fût-elle prise au dépourvus.
Elle y réfléchit alors qu'il la fit entrer. Il s'excusait pour le désordre alors qu'il n'y en avait pas du tout, qu'est-ce qu'il aurait dit alors si il avait vu son appartement à elle qui était un perpétuel chantier ou elle seule pouvait s'y retrouver? L'ordre du chaos comme on dit.

Répondant à ses premières questions, elle dit :

- Je me dois de savoir comment vont mes patients...surtout quand le patient en question est aussi intéressant.
Si vous avez du thé, ça ne serait pas de refus.

Ces paroles pouvaient avoir deux sens, pour Jayanti, c'était l'intérêt professionnel bien entendu, pour Calvin, cela pouvait aussi être de l'intérêt personnel, du moins elle espérait qu'il verrait ça comme ça.

Puis après l'avoir remerciée de son aide, il lui parla de quelque chose que l'on avait déposé dans sa boîte aux lettres pour elle. Curieux en effet, un patient quelconque l'aurait déposé à son bureau, ça aurait été plus naturel, mais Jayanti savait d'où cela provenait, et se demanda aussitôt pourquoi avoir fait cela? Etait-ce parce qu'il n'avait pas assez de contrôle sur Calvin pour pouvoir le lui apporter à son bureau, ou était-ce simplement la façon dont il procédait? Elle prit la missive en hochant la tête poliment, puis en lu son contenu.
A bien y réfléchir, Jayanti n'avait pas vraiment envie de reparler avec le docteur Grey, il ne lui apporterait plus rien maintenant, il n'essayerait que de l'endormir avec ces propos et il fallait donc qu'elle reste vigilante. Et puis si il fallait repasser par l'hypnose pour un entretien, maintenant que Calvin n'en avait plus besoin, il serait étrange de lui demander de participer à une autre séance. Le docteur Grey lui avait parlé de somnambulisme au sujet de Calvin, si il avait dit vrai, et si ce qu'elle pensait s'avérait juste, il y avait bien un autre moyen de s'entretenir avec lui, il fallait qu'elle y réfléchisse.

- Visiblement, mon patient est assez paranoïaque que pour passer par une tiers personne pour mon remettre son message, puis-je également passer par votre boîte aux lettres quand j'aurais pris ma décision?

Il fallait bien que son histoire paraisse crédible, même si elle ne comptait pas avertir le docteur Grey de quand elle le ferait ressurgir si elle prenait cette décision, elle ferait comme si.

« Un thé? Oh oui, bien sûr, immédiatement… Je vous sers cela, prenez place, je vous prépare cela… Ce ne sera pas bien long… Vous avez de la chance, j’en ai racheté pas plus tard qu’hier entre deux supervisions de mission! »

Répondit Calvin en se précipitant pratiquement à la cuisine. Excessif comme réaction? Peut-être bien mais il ne faut pas oublier qu’il était accro à son travail… Et en sortir était parfois chose ardue. Pendant qu’il préparait le thé, il laissa son esprit vagabonder, se demandant ce qu’il ferait de son temps avec le docteur Keo. Intermède que saisit allègrement l’ignoble docteur Grey pour s’amuser aux dépends de la psychologue. Calvin ayant eu pendant longtemps des troubles de sommeil il lui restait par conséquent des somnifères qu’il laissait avec sa boîte de thé, préférant les prendre avec le dit breuvage. Et comble de chance, ce format se dissoudrait parfaitement dans le thé, devenant somme toute invisible mais encore très efficace… Et une fois le docteur Keo avec facultés affaiblies ou endormie… Il aurait tout le loisir de se livrer à tous les examens qu’il voudrait sur sa personne. Les marques physiques d’assauts invisibles, des signes qui seraient des mises en garde de son étrange talent, des indices ou qui sait… Des documents que la docteure aurait transportés avec elle. Mieux encore… Il pourrait essayer de jouer avec son esprit… Il suffisait de se donner les conditions gagnantes pour amener au développement d’un désordre mental pour qu’un autre comme lui se développe dans la tête de la psychologue… Et en ayant un acolyte contrôlant le docteur Keo… Les possibilités devenaient très intéressantes…

Le tout ne dura pas plus de quelques secondes et Calvin par conséquent ne se rendit compte de rien si ce n’est qu’il avait encore oublié de ranger ses somnifères dans la pharmacie, n’en ayant plus besoin depuis que le docteur Keo s’était penchée sur son cas. Il se le nota mentalement avant de retourner au salon, portant plateau et « condiments » pour le thé : miel, sucre, lait, crème… Nommez les, ils étaient là!

« Voilà! J’espère ne pas avoir été trop long. Et… Sans vouloir me montrer trop curieux… Pourquoi votre patient passe t’il par moi? Je veux dire… Il y a des dizaines de membres de la Diacryon… Et je ne suis pas le seul membre de la logistique ou votre seul patient de sexe mâle… Je sais que vous êtes tenue au secret professionnel et tout mais…. »

Car il fallait bien l’avoué… Calvin ne se souvenait pas avoir vu quiconque rôder près de son domicile et pourtant, il était très vigilant… Enfin, peut-être s’en faisait-il pour rien après tout, ce ne serait pas la première fois de toute façon.

« Dites moi docteur Keo… Je ne suis pas spécialiste mais c’est bien connu : plus un individu est joli, plus le nombre de ses prétendants est élevé. Alors… Pourquoi portez-vous un certain intérêt envers moi? Il y a sûrement meilleur parti ailleurs dans l’organisme, non? Parce que vous êtes une femme ravissante et moi un homme plutôt quelconque. Enfin… Je crois… »

Demanda naïvement Calvin. Il était à des lieues de se douter de ce qui se tramait contre lui entre Grey et Keo…

Suivant son conseil, la jeune femme s'installa. Et attendit donc son thé, ne remarquant bien évidemment pas l'usage de somnifères; ce geste montrait bien que le docteur Grey ne savait rien, ou presque du moins, de Jayanti Keo. Les somnifères que l'on trouvait en pharmacie n'avait plus aucun effet sur la psychologue depuis bien longtemps, essayez donc de dormir quand une dizaine de voix résonnent constamment dans votre tête, somnifères ou pas. Pour arriver à trouver le sommeil une fois de temps en temps, Jayanti avait recours à la Belladone, oh à très très petite mesure bien sur, consciente de danger que cette plante représentait pour l'être humain, mais elle avait un jour lu que cette plante pouvait avoir un effet soporifique à petite dose, aussi s'en servait-elle quand elle avait vraiment besoin de repos depuis lors. Ce comprimé n'aurait donc presque aucun effet sur elle, elle se sentirait peut-être légèrement plus fatiguée que d'habitude.

Autre preuve de son ignorance envers la jeune femme, il pensait pouvoir jouer avec son esprit, mais si elle était si faible que cela, cela ferait bien longtemps que toutes ses entités s'en seraient emparer, or il n'y était jamais parvenu. Oh pas que Jayanti soit invincible, bien entendu, elle avait ses failles, seulement elle était parfaitement maître d'elle, résultat d'une vie tourmentée par tant d'esprits.

Mais soit, actuellement, Jayanti n'était au courant d'aucun des plans du docteur Grey et n'avait donc aucune raison de se méfier, aussi agrémenta-t-elle son thé de miel avant d'y goûter; décidément rien ne valait son thé au jasmin, mais elle se contenterait de ça faute d'autre chose, ne pouvant avaler une seule goute de café.

Elle haussa les épaules :

- Vous savez, j'ai beaucoup de patients dont je ne cherche même pas à comprendre le raisonnement, peut-être pensait-il que vous étiez une personne de confiance, voilà tout.

Nouveau désarçonnement, Jayanti avait vraiment du mal avec toutes ces choses mielleuses. Cela dit, elle faisait de son mieux pour ne rien laisser paraître.Ravissante? Il divaguait, la jeune femme ne s'était jamais trouvée ravissante, elle n'avait même jamais pensé qu'elle pourrait l'être. Elle n'eût toutefois aucun mal à faire croire à l'embarras, étant donné qu'elle réfléchissait à ce qu'elle allait dire, on aurait pût confondre ça avec de l'embarras.

- La dopamine, l'endomorphine...toutes ces choses ne se commandent pas, même si je le voulais, je ne pourrais pas dire : il faut que ce soit cet homme là qui me plaise et pas un autre. Et à mes yeux, vous n'êtes pas du tout quelconque, c'est comme ça.

La jeune femme préférait user de son savoir afin d'être assez convaincante, pourtant, si cela avait réellement été le cas, elle ne l'aurait certainement pas expliqué de cette façon.

« Oh euh… Merci. C’est bien aimable à vous… C’est assez rare de recevoir des compliments ou des commentaires positifs en ce bas monde, surtout de nos jours… Cela a de quoi vous déstabiliser un peu je dois bien l’avouer… »

Balbutia Calvin, mal à l’aise. Il n’était pas habitué à ce genre de conversations, loin de là! D’habitude, il s’en tenait à des échanges souvent brefs et nerveux avec les agents de terrain et c’était à peu près tout… Qui plus est, de façon générale, les longues conversations étaient dédiées aux rapports alors ce n’était pas non plus le lieu de socialisation idéal… Il prit donc une gorgée de sa propre tasse de thé pour se donner une certaine contenance, tentant de rester professionnel sans toutefois tomber dans la froideur. C’était chose plus ardue que cela pouvait le sembler et il se demanda si le ton ne faisait pas un peu forcé lorsqu’il reprit la parole.

« Chose certaine, je suis heureux que ce patient passe par moi si c’est la un moyen de vous revoir. Pour un peu plus et j’aurais pratiquement cru que j’étais devenu une sorte de cobaye, une expérience. Je pensais au début que cette missive était un piège ou quelque chose de désagréable mais je me rends bien compte que je suis trop méfiant pour ne pas dire paranoïaque. À passer trop de temps à faire face au danger derrière un écran, on finit par en acquérir de bien curieux effets… »

Dit Calvin en riant de sa propre inquiétude. Il avait tendance à voir des complots partout, ce qui était chose normale : on avait tenté à plus d’une reprise de le tuer avant son entrée à la Dyacrion… Il se nota mentalement de faire plus attention et de ne pas voir de mal partout où il passait : le monde ne tournait pas autour de lui après tout!

Au plus profond de son esprit, le docteur Grey s’impatientait. Son hôte était si naïf et inutile par moment qu’il en aurait bien hurlé de rage et de dépit s’il en avait eu l’occasion. Mais là n’était pas le moment ou le temps pour ce genre de choses. Il devait observer le docteur Keo. Son prochain sujet de test. Il fallait qu’il trouve les faiblesses de cette femme… Quelle mauvaise menteuse, cela se voyait tout de suite qu’elle jouait la comédie… L’amour rendait effectivement aveugle si son crétin d’hôte ne s’était encore rendu compte de rien. Évidemment, il lui avait suggérer certains mots pour faire réagir la médecin. Et si les choses continuaient à prendre tant de lenteur, il balancerait le pot aux roses. Tant pis pour l’expérimentation passive si cela venait à se produire. Cependant, il espérait ne pas en arriver là : opérer à visage découvert n’était pas forcément la meilleure des idées et encore moins l’idée la plus géniale qui soit…

La situation tournait vraiment au pathétique, mais elle n'y pouvait rien, à part jouer un rôle encore plus pitoyable, qui bien évidemment, ne lui allait pas du tout. Mais manifestement Calvin ne s'en rendait pas compte, et c'était tant mieux, Jayanti trouvant qu'elle faisait déjà de gros efforts.
Elle ne trouva rien d'autre à faire que de lui sourire quand il lui dit que ça avait de quoi le déstabiliser, sa présence étant généralement apaisante pour tout le monde, ça suffirait bien ainsi.

Puis vint le moment ou il lui confia ses craintes, si cela avait été une vraie consultation, elle se serait dit qu'elle avait à faire à un autre paranoïaque de service, et elle n'aurait pas eu tort, mais dans le cas présent, elle pouvait comprendre, et cela ne l'aurait pas étonné que le docteur Grey lui ai soufflé ces mots précis afin de la déstabiliser, cela dit, s'attendant à à peu près tout, ça ne marcha pas.

Avec une réticence certaine, Jayanti posa sa main sur celle de Calvin dans un geste qui se voulait rassurant, tout en gardant le sourire aux lèvres :

- Rassurez-vous, ici, vous n'avez pas à vous inquiéter, vous n'êtes qu'un intermédiaire choisis au hasard, et ça n'aura aucune conséquence.

Dans un sens, ce n'était pas complètement faux, puisque sans qu'elle le sache, le docteur Grey voulait faire d'elle sa prochaine victime et pour l'instant, Calvin jouait bel et bien le rôle d'intermédiaire. La chose sur laquelle elle se trompait peut-être, c'était que ça n'aurait aucune conséquence.

Sans qu'elle sache pourquoi, sa tête se mit à tourner, se disant que cela passerait et que ce n'était probablement qu'une carence en quelque chose, elle termina sa tasse de thé. Bien que les somnifères ne lui fassent rien, le mélange Belladone/somnifère en était bien la cause, mais les résultats seraient beaucoup plus graves, eux.

Un intermédiaire? Voilà qui fit froncer les sourcils de Calvin. Quelque chose ne collait pas dans cette histoire. Il n’était pas spécialiste mais il n’avait jamais entendu parler d’une telle chose. Se pouvait-il que le docteur Keo lui cache quelque chose, quelque chose au regard du secret professionnel? Possible, fort possible, il faudrait qu’il télécharge le code de déontologie des psychologues sur sa station de travail… Quelque chose en lui lui disait que Jayanti n’était pas aussi franche qu’elle ne le laissait paraître… Et malgré les sentiments qu’il éprouvait pour elle, sa méfiance naturelle menaçait de prendre le dessus. Il faudrait plus que de belles paroles et de petits gestes pour lui faire baisser sa garde si celle-ci allait croissant au fil de la conversation…

¤Elle te ment Calvin… Tu l’aurais vu sinon ce mystérieux messager… Elle te trompe… tu aurais dû ouvrir la missive… Qui sait ce qu’elle manigance? Méfie toi Calvin, exige des preuves concrètes de son soit disant sentiment réciproque… Tu es peut-être en grand danger et tu l’ignores, tes sentiments t’aveuglent…¤

Encore un coup de Grey qui profitait de la situation. Avec une Jayanti qu’il supposa bientôt endormie pour de bon, il comptait bien guider Calvin dans sa propre logique tordue pour créer une réaction en chaîne qui le rapprocherait de son objectif. Tôt ou tard, il aurait un moyen de se libérer et de parasiter d’autres esprits… Et le plus tôt serait le mieux. Un corps si limité, aussi brillant soit-il lui était de bien peu d’intérêt. Keo et ses esprits étaient la clé d’une invasion psychique à grande échelle… Un moyen de se survivre, de devenir immortel… Il était simple construction psychique et il comptait devenir une sorte de dieu. Survivre à l’esprit, survivre au corps… Il n’aspirait à rien de moins. Et cela, Jayanti Keo n’en soupçonnait même pas un soupçon, un fragment.

¤Elle te manipule Calvin… tu es un jouet, un pion entre ses mains. Toi, celui qui aurait dû être président… Ce devrait être toi qui la manipule! Rebelle toi contre ses sordides manipulations! Contre ses faux sentiments…¤

Calvin ne savait pas trop comment réagir, entendant en synchronisme son cœur et sa tête. Tout une affaire. Il regardait avec attention le docteur Keo, attendant une réaction, un signe pour infirmer ou confirmer ce que ces deux voix lui disaient… Et il se rendit vite compte qu’elle ne semblait pas dans son assiette.

« Est-ce que ça va? Vous… Vous n’avez pas l’air dans votre assiette docteur. Vous ne semblez pas au meilleur de votre forme pour tout dire franchement. Vous voulez quelque chose, une aspirine, je ne sais pas? »

Demanda le membre de la logistique, surprit par ce changement plutôt soudain chez la docteure. Il y avait de quoi rester surprit à tout le moins…

Si Jayanti avait été en mesure de réfléchir et surtout de savoir ce à quoi Calvin était en train de penser, elle aurait immédiatement su que le docteur Grey essayait bel et bien de prendre le contrôle de l'esprit de ce pauvre Calvin. Mais elle était loin d'être en état de réfléchir tellement la pièce s'était mise à tourner autour d'elle.
Seule l'intervention de Calvin l'aida un peu à se focaliser sur ce qu'il se passait. Il lui proposait de l'aspirine? Non si elle prenait de l'aspirine, ça pourrait la tuer, ça elle le savait, tout comme elle savait aussi également que ce serait le cas si elle prenait n'importe quel autre médecine, comme un somnifère par exemple, mais bien entendu, Jayanti ne savait pas qu'elle en avait ingurgité un, elle mit donc ça sur le compte d'une simple hausse de tension.

- Non, je vous remercie, il vaudrait peut-être mieux que je fasse un saut à l'infirmerie.

Sur ce, Jayanti décida de se lever...ce qui était loin d'être une bonne idée, bien évidemment. Il lui sembla que la pièce tournait encore plus maintenant qu'elle était debout. Et comme elle était plus faible que d'habitude, elle n'était plus aussi apte à faire abstraction de toutes ses voix qui résonnaient continuellement dans sa tête, qui se mirent aussitôt à résonner amplifiées, l'empêchant de penser à quoi que ce soit d'autre.
La jeune femme essaya tant bien que mal de se diriger vers la porte, afin de pouvoir faire ce qu'elle avait dit, bien qu'elle se demandait comment elle pourrait arriver à l'infirmerie, alors qu'il lui était difficile de faire quelque pas, et tituba quelques instants.

Puis il lui sembla que ses jambes s'étaient transformées en coton, et elles se dérobèrent sous son poids.
Jayanti n'eût même pas conscience qu'elle venait de heurter la dureté du sol. Tout devint confus pour elle, puis ce fût le néant complet, elle perdit connaissance.
Ce n'était pas la première fois, ça lui était déjà arrivé un soir sur les docks à la suite d'une rencontre qui avait mal tourné. Mais cette fois, son état de santé était bien pire, en effet sa tension était beaucoup trop haute, mais elle avait également des palpitations, si personne ne faisait rien, elle risquait sa vie.

« D… Docteur Keo? Docteur Keo! Mais qu’est-ce qui se passe?! Que vous arrive t’il? J’appelle l’antenne médicale en urgence, tenez bon! »

Calvin n’était pas médecin et n’avait pas l’intention de s’improviser comme tel. Il se rua donc sur l’intercom qui le reliait au reste de la Diacryon, hurlant presque sa demande d’assistance aux oreilles du répartiteur. Il était si rare de voir Calvin se préoccuper de quoi que ce soit d’autre que de son travail qu’on décida de lui envoyer d’urgence l’aide qu’il réquisitionnait. Faites lui le bouche à bouche. Fut tout ce qu’on lui demanda, le temps que les secours arrive. Calvin eu beau jeu de protester, c’était ça ou risquer de perdre la jeune femme. Eh ben…

¤C’est bien ma veine, elle va penser que j’abuse d’elle si je fais ça… Mais d’un autre côté je ne peux pas la laisser mourir… Ce serait bien ingrat de ma part. Bon ben… On s’y met hein, y a pas trente six solutions…¤

Et donc Calvin se mit au travail malgré la voix qui lui disait d’abuser de la jeune femme, de profiter de sa position de faiblesse à son avantage… Calvin mit cela sur le compte de l’imagination, comme quoi le stress lui jouait des tours et tout. Sûrement cette affaire d’esprit dont avait parlé le docteur Keo. Chose certaine, il mit toute sa bonne volonté et ses maigres connaissances en premier soins à l’œuvre jusqu’à l’arrivée des autorités compétentes, ne pouvant faire bien plus. Sans le savoir, Grey prit temporairement le contrôle pour murmurer des choses à l’oreille d’une Jayanti inconsciente ses propres observations.

« Vous voyez docteur Keo… Il vous aime et vous respecte lui. Mais vous… Vous n’êtes qu’une profiteuse éhontée et égoïste… Ce n’est pas tant Calvin que j’étudie mais les deux pôles de cette relation à sens unique… Et c’est excessivement enrichissant. Vous ne m’en voudrez pas j’espère d’avoir épicé votre breuvage? Un mal nécessaire pour tester la dévotion de votre pantin. Je vous envie docteur, il se jetterait par la fenêtre sous votre ordre… Je le savais bien que vous ne pourriez pas le voir comme un être doué de sentiments amoureux réels. Que vous ne l’aimeriez pas réellement. D’où le fait que je trouve que vous êtes un beau gâchis. La considération professionnelle avant le personnel… Tsss… Mais soyez sans craintes ma chère, quand je me lasserai de votre petit jeu ingrat… Je vendrai le pot aux roses et alors vous aurez un choix à faire. Je vous laisse deviner lequel… Et il est bien plus radical que vous ne pouvez le sous estimer. »

Il céda ensuite le contrôle à Calvin quand les secours se pointèrent et commencèrent à s’affairer autour de Jayanti. Il les regada faire, anxieux, se demandant ce qui s’tait passé. Inconsciemment, il avait ramené dans la pharmacie les somnifères et en avait presque oublié l’existence. Grey et ses manigances… Même si les médecins décelaient du somnifère et en questionnait la provenance, rien ne pourrait inculper Calvin : le seul passage de sa cuisine à la salle de bain aurait été sous le nez du docteur Keo…

Les mots que lui murmura le docteur Grey, bien qu'elle soit inconsciente, ne furent pas perdus pour autant. Jayanti les entendit mais n'en compris pas tout à fait le sens, mais elle fit un rêve à propos de lui. Bien que ce ne soit pas l'un de ses rêves prémonitoires, c'était une mise en garde.

Les capacités de son corps à évacuer les toxines et bien sur la rapidité des secours, l'avaient mise désormais hors de danger. Elle fut quand même soumise à un test sanguin, le premier des tests à effectuer pour savoir pourquoi son organisme avait réagit de cette façon. Une chance que Jayanti ne se soit pas encore réveillée car elle détestait les piqures.

Quand la jeune femme émergea enfin, elle ne se rappelait plus de son rêve, elle était juste sûre qu'à partir de maintenant, il fallait qu'elle fasse attention à tout, car elle était intimement convaincue que la cause de ce qui venait de se passer était bien le docteur Grey. Certes, Calvin l'avait sauvée, mais sa seconde identité avait bien faillit la tuer, il y avait de quoi être confus, quand elle en aurait finit avec tout ça, elle serait probablement bonne pour une séance chez un psy, quelle ironie.
Son premier réflex fut de vérifier les battements de son coeur; visiblement, ils s'étaient apaisés. L'un des secouristes lui apprit qu'ils devaient attendre d'avoir ses résultats sanguins mais que ça prendrait probablement un peu de temps; Jayanti appréhendait un peu ce moment, pas tant pour ce qui avait déclenché son malaise, mais parce que l'on découvrirait qu'elle utilise de la Belladone, or c'est loin d'être recommandé, surtout lorsque l'on n'est pas suivis médicalement, elle se ferait donc passer un savon, mais soit, c'était son corps après tout, elle en faisait ce qu'elle voulait, il lui faudrait juste être plus méfiante, et surtout ne plus rien consommer en la seule présence de Calvin.
Les recommandations d'usage étaient bien évidemment, de ne rien pendant environ six heures, afin de ne pas aggraver la situation, et surtout de boire beaucoup d'eau.
Elle n'eût pas à attendre qu'on le lui dise pour le savoir, et puisqu'elle se sentait déjà beaucoup mieux, à part le fait qu'elle ait l'impression d'avoir la tête comme dans un éteau, elle décida que ça attendrait bien qu'elle rentre chez elle.

Avec un faible sourire, à l'attention de Calvin, elle dit :

- Je crois que c'est à mon tour maintenant, comment pourrais-je vous remercier?

« Je l’ignore mais vous m’avez fait une de ces peurs! Que s’est-il passé? Une seconde vous étiez en pleine forme et la seconde d’après vous étiez par terre! Est-ce que cela est lié à hum hum… Vos… Comment dire… Amis indésirable? Ce sont eux qui vous ont mit dans un tel état? Parce que si oui ce doit être invivable… »

Questionna Calvin qui cherchait ce qu’il y avait de plus logique, son esprit toujours partiellement manipulé par Grey. Pour lui, il étai exclu qu’il puisse être en cause ou que quoi que ce soit venant de son appartement puisse être en cause. Non, il respectait le docteur Keo, il eut été stupide de tenter de la tuer, cela n’aurait que peu pour ne pas dire pas de sens… Il se risqua toutefois à lui poser LA question qui lui brûlait les lèvres, au risque d’avoir l’air idiot. Après tout, à ne rien demander il n’obtiendrait rien et la question en soit était à son avis légitime…Voire naturelle dans ces circonstances.

« Vous euh… Vous ne m’en voulez pas de vous avoir fais le bouche à bouche non? Parce que je leur ai dit moi que sans votre consentement ce n’était pas une bonne idée! Mais ils se sont montrés insistants et ils ont dit que si je n’agissais pas, vos pourriez y rester alors en toute logique je me suis plié à leurs exigences. Je vous assure que ce n’était pas mon intention première, loin de là! Mais d’un autre côté, je ne pouvais pas vous laisser mourir non plus, il fallait faire quelque chose… »

Évidemment, il n’y avait pas de quoi en faire un plat mais Calvin lui y voyait là un peu plus, comme d’habitude d’où sa réaction. Dans sa tête à lui, Jayanti Keo pourrait bien le poursuivre pour harcèlement. Elle avait beau dire avoir un intérêt pour lui, il ne voyait pas grand preuves tangibles donc il commençait sérieusement à douter. Et cela le rendait nerveux. Et quand il était nerveux il avait tendance à se retrancher sur la défensive. Auquel cas alors il devenait plus difficile de lui tirer les vers du nez ou d’interagir avec lui. Elle allait avoir du sport à faire, la psychologue, pour le faire sortir de ses retranchements! Surtout avec Grey qui s’amusait à envenimer les choses pour contrarier Jayanti et observer ses réactions…À date, c’était bien lui qui ressortait grand gagnant sur tous les tableaux… Ce qui n’était pas forcément une bonne chose tout bien considéré. À vrai dire, ce n’était vraiment pas une bonne chose. Loin, très loin de là.

C'était dit d'une telle façon que Jayanti se sentit presque obligée de s'excuser, mais après tout, c'était de sa faute à lui si elle avait été dans cet état quelques minutes, indirectement bien sur, mais tout de même !
Il lui demanda si c'était des esprits qui lui avaient infligés ça. Evidemment, elle ne pouvait lui dire la vérité, mais cela ne servait à rien de mentir complètement, les esprits ne s'attaquaient jamais à elle quand elle n'était pas seule, sauf en cas de séance de spiritisme, mais là elle les appelait, c'était différent. Cependant, elle ne pouvait pas non plus en faire part à Calvin, elle ne tenait pas à donner de renseignements trop utile à Grey, aussi répondit-elle simplement :

- Humm non, ils ne m'ont rien fait, probablement une simple intoxication...

Elle préférait rester évasive, tout bêtement parce que c'était plus pratique, plausible, et même très proche de la vérité, bien qu'elle n'en soit même pas certaine, elle était convaincue que ça venait du thé, elle n'attendait plus que les résultats de l'examen sanguin pour en être vraiment sûre.

Ce qui suivit, ni lui fit ni chaud ni froid, elle n'avait absolument aucuns souvenirs de bouche à bouche, et c'était tant mieux; par contre, cela signifiait que Calvin ne croyait pas tellement aux sentiments qu'elle prétendait avoir pour lui, et ça c'était ennuyeux. Elle ne comprenait pas vraiment ce qui manquait à son jeu, elle essayait d'être tactile sans l'être trop, elle avait cet air niais que les autres filles ont quand la personne qu'elles aiment leur fais des compliments...etc.
Il semblait qu'il fallait qu'elle se montre un peu plus entreprenante alors que Calvin, lui, ne l'était pas non plus, elle pouvait elle aussi douter de ses sentiments, bon il lui avait sauvé la vie, mais était-ce une preuve réelle?
Soit, il fallait qu'elle agisse, c'est ce qu'elle ferait. Tout d'abord, elle lui sourit, Jayanti songea alors qu'elle n'avait probablement jamais autant souris de sa vie et se sentait stupide, mais puisqu'il le fallait...Elle approcha son visage de celui de Calvin, et stoppa à quelque millimètres, pour donner l'illusion qu'elle savourait l'instant présent, et finit par l'embrasser. On ne peut pas dire que ce fut un baiser passionné, mais quand même beaucoup plus convaincant que le premier.
Elle y mit fin avec un regret feint, et dit, toujours souriante :

- Est-ce que ça répond à votre question?

En effet, pour l'instant, elle n'avait d'autre choix que de se soumettre au petit jeu du docteur Grey, mais elle restait libre d'y mettre fin quand cela lui chantait, et c'était quand même le plus important, car après tout, en bonne égoïste qu'elle était, elle ne faisait cette petite expérience que pour elle-même et elle se fichait bien des autres.

« Eh bien je… Oui. Évidemment… C’est même on ne peut plus démonstratif. Mais docteur, quelque chose m’échappe. Pourquoi aie-je l’impression de ne pas être totalement moi? Il m’arrive de penser certaines choses sans comprendre ni savoir pourquoi et avant votre séance d’hypnose, je ne me souviens pas avoir expérimenté ce genre de… Manifestations si l’on peut appeler cela ainsi. Est-ce là une sorte de choc post hypnose? J’avoue ne pas trop savoir… »

Ceci dit… Il en avait presque oublié ce qu’il avait déniché pour la médecin. En ces temps de misère, il fallait faire des pieds et des mains pour obtenir n’importe quoi… Et Calvin, à l’aide de ses connaissances des caches gouvernementales avait fait toute une découverte. Côté produits de luxe, il avait trouvé le gros lot.

« Et puisque nous en sommes à parler des effets de cette fameuse séance, m’étant rappelé divers endroits tenus secrets de cette ville, j’en ai profité pour vous ramener un petit quelque chose. J’espère que vous apprécierez! »

Calvin alla s’emparer d’un petit coffret posé non lui, l’ouvrit et le tendit à la psychologue. À l’intérieur se trouvait une sélection très pointue de chocolats fins, des marques qui avaient disparues d’Ataxia avec la mort de son président. De vraies perles rares conservées et encore comestibles dans un caisson spéciale, à l’abri du temps pendant toutes ces années...

« N’est-ce pas une vision plutôt enchanteresse? Dans les hautes sphères de la société, on se tuerait pour avoir un tel trésor! Vous avez entre vos mains de quoi vous faire une fortune si jamais vous décidiez de ne pas les garder pour vous. Et ce n’est bien sûr que le début de présents que je garde tout spécialement pour vous chère Jayanti! Vous êtes une femme d’exception et à femme d’exception cadeaux d’exception! Demandez et vous aurez, je me fais une joie de me plier à vos quatre volontés! »

Affirma Calvin sur un ton on ne peut plus sérieux malgré les protestations de Grey. Si Jayanti était moindrement observatrice, elle pourrait voir que tant qu’elle faisait vibrer la fibre amoureuse de Calvin, elle rendait complètement inoffensif Grey… Une arme redoutable contre cette entité psychique malfaisante. Voilà de quoi remettre les pendules à l’heure et tenir Grey à distance. Expérience ou pas… Qui sait, peut-être qu’un jour Jayanti contrôlerait et Calvin et Grey…

Calvin sautait une nouvelle fois du coq à l'âne, ce qui, il faut bien l'avouer, avait le don d'agacer Jayanti; soit elle n'avait d'autre choix que de se montrer patiente, ce qu'elle fit docilement.Il se demandait pourquoi il avait des idées étranges par moment, la cause, s'était Grey à n'en pas douter. Elle se heurta à nouveau au fait qu'elle ne pouvait le lui révéler, mais elle avait quand même une explication très valable.

- Cela se peut bien oui, je vous avais dit que je n'étais pas une spécialiste, quel genre de pensées exactement?

Jayanti était curieuse de savoir, elle se doutait que ça ne devait pas être tout rose, mais elle préférait savoir, et puisque c'était lui-même qui avait orienter la conversation dans ce sens, il n'allait pas lui mentir, ou alors ce serait encore l'oeuvre du docteur Grey.

Quand Calvin lui offrit cette boite de chocolats, Jayanti se demanda ce qu'elle avait de plus que les autres; il faut dire qu'elle n'y connaissait rien en chocolats. Il lui annonça alors que cela valait beaucoup d'argent. Elle se demanda un moment pourquoi des gens voudraient acheter du chocolat aussi cher, mais leur stupidité ne l'étonnait plus vraiment, aussi le crût- elle sur parole.
Ainsi, il se disait prêt à faire tout ce qu'elle lui demanderait; elle ne mettait pas sa parole en doute, mais elle se demandait jusqu'où il pourrait aller, c'était bien là le sujet de son expérience, même si celle-ci n'avait pas encore débuté, parce qu'elle pensait qu'il fallait une certaine préparation.
Et afin d'assurer une bonne préparation, il ne fallait pas qu'elle passe pour une femme cupide, aussi fit-elle comme si cela lui faisait immensément plaisir.

- Oh merci beaucoup !

Elle l'enlaça pour ajouter plus de crédit à sa prestation.
Et d'un air faussement embarrassé, elle ajouta :

- Mais il ne faut pas voyons.

« Là, comme ça, je ne me souviens pas exactement mais je tiens un journal dans lequel je note toutes ces choses. Je me suis dit qu’il faudrait que je vous consulte à nouveau alors j’ai fais le nécessaire pour vous donner des pistes pour m’aider. Il est sur la commode à l’entrée. C’est le cahier noir dont le stylo traîne non loin. »

Expliqua Calvin avant de se faire enlacer par la psychologue. Il devint tout rouge, balbutiant quelque chose avant de se ressaisir. Il fallait quand même garder une certaine notion de professionnalisme non mais! Autrement, on en arrivait dans les incohérences et l’incompréhension générale, ce qui n’était pas forcément une bonne chose. Quelques secondes seulement furent nécessaire à ce qu’il se ressaisisse complètement.

« Ah mais ce n’est pas grand-chose voyons, c’était tout naturel que de vous faire un tel présent. Si vous avez des préférences, il ne faut pas se gêner, demandez et je tâcherai de le trouver je vous assure! Cela me fera grand plaisir! »

Il alla ensuite chercher le dit journal et le tendit à Jayanti. Si elle se donnait la peine de le lire, elle se rendrait compte que Grey tentait à la fois de dissimuler son existence, ses plans et ce que faisait Jayanti mais également de pousser Calvin à des actions radicales envers la psychologues dont les conséquences mettraient dans un beau bordel tant Calvin que la psychologue. Plan de sa propre composition ou simple tentative de catalyser une réaction en cours? Chose certaine, Grey avait quelque chose en tête qui servait à la fois Jayanti tout en lui étant nuisible. En poussant Calvin à se rapprocher de Jayanti tout en lui parlant de ses plans pour forcer la psychologue à se montrer plus entreprenante, il risquait de faire foirer le tout et de forcer Jayanti à des actions radicales tant contre Calvin que contre lui. Il allait vraiment falloir qu’elle se retape une bonne discussion avec lui… Ou qu’elle trouve un moyen d’entrer en communication plus souvent avec lui. Dans son intérêt comme dans l’intérêt indirect de Calvin.

« Vous avouerez, en le lisant, que c’est tout de même curieux non? Je ne comprends pas comment ou pourquoi ces pensées se forment et se créent. C’en est même perturbant. Un thème qui revient souvent est d’être plus entreprenant dans notre… Relation… Quelque chose me dit que ce n’est pas tout à fait normal. Mais après tout, l’expert c’est vous et non moi. Je me fierai donc à votre expertise en la matière. »

Calvin se demandait sérieusement comment il se faisait que les choses prenaient une tournure aussi étrange. De son point de vue personnel, cela faisait trop peu de sens pour être pleinement logique… Mais il avait trop de foi en Jayanti Keo pour contester réellement quoi que ce soit. Donc en personne sage et rationnelle, il ne se risquerait à rien de concret au regard de ses interrogations avant d’avoir reçu le feu vert de son médecin. On ne pourrait pas le taxer d’irresponsabilité ou d’imprudence c’était bien certain!

Manifestement, si ce journal existait bel et bien, c'était que Grey souhaitait qu'elle sache ce qu'il faisait; autrement, il se serait débrouillé pour réduire ces preuves en poussières, si il était bien capable d'essayer de la droguer, et de lui faire parvenir un message, il était tout aussi capable de détruire ce cahier.

Cette situation s'avérait être très complexe, et bien que Jayanti n'en n'ai pas vraiment envie, il faudrait bien qu'elle lui reparle. Et bien entendu, elle se servirait de ce qui troublait Calvin pour retenter une séance d'hypnose, étant donné que c 'était là le seul moyen qu'elle connaissait pour communiquer avec lui. une nouvelle fois, Jayanti se demanda si toute cette comédie en valait bien la peine.

Calvin, quant à lui, lui semblait tout dévoué; ce qui l'arrangeait bien. Cependant, elle ne pouvait se précipiter, et lui demander d'exécuter tel ou tel plan pour elle, ni même de lui rapporter quoi que ce soit, cela paraîtrait louche; non il fallait qu'elle prenne son temps, aussi répondit-elle :

-C'est que, justement ça me gêne de vous demander de telles choses sans rien en retour.

Elle ne tenait pas vraiment à lui donner quoi que ce soit en retour, c'était certain, mais ça paraissait sûrement plus naturel ainsi, elle ne tenait pas à passer pour une opportuniste; même si Calvin avait de réel sentiments pour elle, il n'était quand même pas assez bête que pour ne pas le remarquer.

Jayanti fit mine de réfléchir, et tenta d'amener une éventuelle séance d'hypnose sur le tapis.
Elle se mordit la lèvre inférieur, comme si elle se reprochait quelque chose.

-Je vous avais dit que je n'étais pas une spécialiste...dit-elle d'une toute petite voix.

-Il se pourrait que j'ai...déréglé quelque chose dans votre subconscient et que ça en soit donc la cause.

« Dérégler quelque chose? Allons donc, vous vous faites des idées ma parole… Ce genre de choses se serait déclaré bien plus tôt, j’en suis sûr! Le problème est très certainement autre, je ne vois pas pourquoi vous remette votre travail en doute… Dans le pire des cas… Il existe des cliniques privées en Ataxia, j’irai y faire un tour, consulter un spécialiste comme vous dites. Ah, les professionnels… Toujours à remettre en cause la qualité de leur travail, c’en est déroutant. Il ne faut pas voyons! »

Fit gentiment savoir Calvin, avec un large sourire. Ah tiens, elle tentait de le mettre mal à l’aise, sans doute un test, quelque chose dans ce goût là. Peut-être une sorte de façon de poser un diagnostique, qu’en savait-il. Et puis du reste, il se pouvait très bien que ce ne soit là que les effets de la fatigue, une sorte de crise de somnambulisme. Il avait déjà vu ce genre de choses au sein même de l’organisation après tout, à croire que la Diacryon était un ramassis de malades mentaux, de dérangés et de névrosés… Quoi qu’au vu de la provenance de tous et chacun, cela n’avait rien de bien étonnant… Sans compter sur le critère d’admission dans l’organisation évidemment!

Il allait enchaîner sur quelque chose d’autre quand son téléphone portable sonna. Curieux, qui pouvait bien appeler? Il décrocha et au fur et à mesure que son interlocuteur parlait, la couleur disparaissait peu à peu du visage de Calvin. L’échange se fit plus vivant, plus corsé, plus animé… Et Calvin reprit es couleurs mais en tirant sur le rouge cette fois. Restant à grand peine maître de lui, Calvin mit fin à la conversation avant de faire un sourire d’excuse au docteur Keo.

« Vous… M’excuserez j’espère… Une urgence qui demande que je sois à ma station de travail dans les minutes à venir. Apparemment… Certains de nos agents sont prit au milieu d’un échange de coups de feu impliquant au moins deux des trois factions criminelles, vraisemblablement la Mavros et la Schya… C’est un rien imprévu mais… Le devoir avant tout… J’espère que vous comprenez… »

Raccompagnant donc la jeune femme à la porte, il verrouilla derrière lui avant de s’excuser une dernière fois, de lui souhaiter une bonne journée et de se ruer à sa station de travail, tout trouble personnel oublié…

» Visite de l'appartement de Lorn par Lorn.
» Visite chez Carter [PV Carter]